R&D et Innovation au service de la transition énergétique
L’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie) a organisé un séminaire les 17 et 18 mai derniers à Paris sur le thème de la recherche au service de la transition énergétique. Dans son dernier numéro, Metal News a traité de la contribution de CTIF à ces journées avec le projet Ecofusion. Dans ce numéro, retour sur cette conférence qui a mis en lumière comment la recherche, le développement et l’innovation peuvent être au service de la transition énergétique.
La croissante verte
La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a été promulguée le 17 août 2015. Ce texte permet à la France de contribuer efficacement à la lutte contre le dérèglement climatique et de renforcer son indépendance énergétique, tout en équilibrant mieux ses différentes sources d’approvisionnement. Plus spécifiquement, les cibles de la transition énergétique sont par exemple:
- – 40 % d’émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990,
- – 30 % de consommation d’énergies fossiles en 2030 par rapport à 2012,
- Porter la part des énergies renouvelables à 32 % de la consommation d’énergie finale en 2030 et à 40 % de la production d’électricité,
- Réduire la consommation d’énergie finale de 50 % en 2050 par rapport à 2012,
- – 50 % de déchets mis en décharge à l’horizon 2025,
- Diversifier la production d’électricité et baisser à 50 % la part du nucléaire à l’horizon 2025.
Parmi les mesures entreprises permettant d’atteindre les cibles, on trouve : la rénovation des bâtiments pour économiser l’énergie et faire baisser les factures et créer des emplois, le développement des transports propres pour améliorer la qualité de l’air et protéger la santé, la lutte contre les gaspillages et la promotion de l’économie circulaire, le développement des énergies renouvelables et la sûreté nucléaire.
Dans ce contexte moteur, ce séminaire a permis de montrer comment la recherche, le développement et l’innovation peuvent être au service de la transition énergétique. Organisé sous forme de tables rondes et d’ateliers animés par des industriels et des organismes publics, le séminaire offrait des présentations sur différentes thématiques, telles que : urbanisme durable, bâtiments responsables, énergies renouvelables, hydrogène et efficacité énergétique dans l’industrie.
Concernant l’efficacité énergétique, la mise sur le marché d’innovations technologiques était présentée à l’aide de retours d’expériences d’entrepreneurs qui décrivaient le déroulement de leur solution innovante, depuis sa conception jusqu’à sa commercialisation. Bien plus qu’une présentation de technologies, les intervenants apportaient à qui voulait l’entendre des conseils avisés sur la volonté d’entreprendre. Dans ce sens, le séminaire prenait une connotation d’un salon des entrepreneurs, faisant de la transition énergétique et de la R&D, des relais favorables au développement des entreprises.
Mise sur le marché de technologies innovantes
ENOGIA et ENERTIME, deux startups spécialisées dans le domaine des machines thermodynamiques ORC (Organique Rankine Cycle désigne une technologie de machine thermodynamique décrivant le cycle de Rankine qui permet, notamment, de produire de l’électricité grâce à un fluide organique -fluide réfrigérant de nouvelle génération, type HFO-, transformé en vapeur par de la chaleur fatale issue d’un procédé, et détendu au travers d’une turbine) communiquaient sur la valorisation de la chaleur fatale contenue dans les effluents industriels.
En effet, la récupération d’énergie sous forme calorifique en vue d’une transformation en électricité consommée en interne dans une usine, est une façon d’améliorer l’efficacité énergétique des entreprises. Les deux gammes de puissance des machines présentées par chacune des startups (respectivement, petites puissances de 10 à 100 kWélec et puissances intermédiaires de 1 à 3,5 MWélec), basées sur des technologies de turbines différentes (respectivement, micro-turbine à haute vitesse avec un alternateur moyé dans le fluide, et turbine axiale multi-étagée à basse vitesse de rotation) montraient les possibilités d’implantation de cette relative nouvelle technologie. Petits clins d’œil au secteur de la fonderie au cours des exposés, la première entreprise explique que pour la fabrication de son produit, les pièces moulées lui permettent de réduire le coût de sa technologie, et la seconde présente son premier prototype installé, dans le cadre d’un projet ADEME-TOTAL, sur le site de la fonderie FMGC à Châteaubriand (44).
BABCOCK-WANSON, chaudiériste et apporteur de solutions pour les chaufferies industrielles, présentait le projet DEMOXIA financé par l’ADEME en 2014 pour développer et faire la démonstration d’un brûleur à faible émission d’oxydes d’azote. Ce brûleur, appelé Modulo+, a pour principales caractéristiques de maintenir les performances énergétiques environnementales du brûleur sur une large plage de fonctionnement, comprise entre 20 % et la pleine charge. Pour y arriver, l’excès d’air est réduit à un taux de dioxygène inférieur à 2,5 % dans les fumées sur toute la plage de fonctionnement. La rangeabilité du brûleur est de 1 à 12, ce qui par rapport aux versions antérieures de 1 à 8 est une amélioration appréciable. Les émissions de NOx sont inférieures à 60 mg/Nm3 permettant ainsi d’anticiper les prochaines évolutions des valeurs limites réglementaires d’émissions plus contraignantes, tout en apportant des gains énergétiques.
EREIE, société de recherche et d’ingénierie énergétique, présentait sa nouvelle conception de pompe à chaleur (PAC) Facteur7® pour la production d’eau chaude sanitaire collective. Le dispositif combine la récupération de chaleur des eaux grises (eaux issues des douches, lave-linge,…) et une PAC à haute efficacité, avec un coefficient de performance égale à 6,4 en moyenne. Le dispositif est constitué d’une filtration et d’un stockage des eaux grises. La production d’ECS est assurée par un préchauffage (échange de calories eaux grises/eau froide) de 10 à 27°C à l’aide d’échangeurs. L’eau à 27°C passe ensuite dans la PAC et alimente les ballons d’eau chaude intermédiaires à 58°C. L’eau chaude ainsi produite servant à la production de l’ECS qui peut être stockée.
FIVES CELES, fabriquant d’équipements destinés au chauffage par induction et au refroidissement industriel, décrivait le projet EcoTransFluxTM, cofinancé par Life + (Financial Instrument for the Environment est un programme de financement des projets de l’union européenne visant à favoriser l’essor de technologies innovantes ayant un moindre impact sur l’environnement) et répondant à des besoins spécifiques de l’industrie sidérurgique. La technologie de chauffage par induction à flux transverse est une innovation permettant de chauffer des bandes d’acier amagnétique à des températures élevées, avec un haut niveau d’efficacité (rendement thermique supérieur à 75 %). La solution permet de travailler au-delà du point de Curie (760°C) et de travailler sous atmosphère contrôlé pour limiter les problèmes d’oxydation. L’homogénéité en température de la plaque +/- 10°C est obtenu par un concentrateur de champs magnétique. Le dispositif permet d’éliminer, dans le procédé de traitement de l’acier inoxydable, une phase de traitement chimique lors du laminage de la bande et donc de réduire les émissions de polluants et de déchets acides.
Comment intégrer ces nouvelles technologies ?
Les différentes présentations des entrepreneurs ont montré que la mise sur le marché des solutions innovantes favorables à la transition énergétique dépendaient moins du coût des équipements eux-mêmes, mais davantage du coût d’intégration de ces technologies sur les sites industriels. Cela est d’autant plus vrai, que les coûts complémentaires liés aux travaux d’installation rendus nécessaires (gros œuvre, terrassement, installation électrique, manutention,..) sont onéreux du fait d’une obsolescence des équipements déjà en place ou de l’insuffisance de mise à jour technologique. Aussi, pour faciliter l’installation des technologies innovantes dans les usines, il faut que ces dernières soient imaginées en prenant en compte leur coût complet d’intégration mais surtout, en ayant le point de vue de l’industriel qui recherche un outil lui permettant de booster sa production et la qualité de ses produits, avec en prime, idéalement, une meilleure efficacité énergétique.
Contact Jean-Marc Piatek