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Rejets des substances dangereuses dans l’eau : quels impacts en fonderie ?

 

Une action au niveau national

Faisant suite au constat de la contamination des milieux aquatiques par des micropolluants minéraux et organiques, susceptibles d’effets potentiels directs et indirects sur la santé humaine et l’environnement, une Directive Cadre sur l’Eau a été mise en place : la Directive 2000/60/CE (DCE) qui vise l’atteinte du bon état et la non dégradation des masses d’eau d’ici 2015 (et au plus tard en 2027), ainsi que la réduction progressive de la pollution due aux substances prioritaires et l’arrêt ou la suppression des émissions, rejets et pertes de substances dangereuses prioritaires.

Objectif : réduire les émissions à la source

En France, la loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 fixe un objectif de 64% de masses d’eau de surface en bon état écologique en 2015. Les objectifs de la DCE sont notamment traduits dans le plan national micropolluants (2010-2013 reconduit pour 2014-2018) qui fixe la stratégie globale de réduction et décline les actions et outils correspondants.La deuxième opération nationale de recherche de substances dangereuses dans les rejets aqueux industriels et urbains (RSDE2) est un des outils réglementaires de ce plan et vise à réduire les émissions à la source. La campagne vise à approfondir les connaissances sur les rejets ponctuels de listes de substances, et à imposer à terme une surveillance puis une réduction des rejets de substances dangereuses dans le milieu naturel pour les activités les plus contributrices.

L’étude de branche Fonderie

Dans le cadre de la campagne RSDE2 2009 – 2013 menée dans les Installations Classées pour la Protection de l’Environnement, 76 fonderies se sont vues prescrire par arrêté préfectoral complémentaire, à la date du 1er juillet 2013, la surveillance initiale de substances à partir des 2 listes sectorielles suivantes :

tableau1

nota : pour les 2 sous-secteurs, ces listes sont complétées le cas échéant par les SDP chloroalcanes C10-C13 et 5 HAP. Dans ce contexte, une étude de branche Fonderie a été réalisée par CTIF avec le soutien financier des Agences de l’eau Loire-Bretagne et Rhin-Meuse. Un comité de pilotage (Agences de l’Eau, CTIF, Fédération Forge Fonderie, INERIS) a assuré le suivi de sa réalisation. L’enjeu est de mutualiser, au bénéfice des industriels de la Profession, les connaissances relatives aux sources potentielles de substances dangereuses dans les rejets issus de fonderie, sur la base :

  • d’une étude bibliographique détaillée,
  • de l’analyse de mesures de surveillance initiale qualifiées dans la base nationale RSDE INERIS,
  • d’une étude des corrélations qualitatives activités/substances,
  • et des résultats de 4 études de cas axées principalement sur la recherche de l’origine de substances dangereuses prioritaires.

L’étude doit faciliter la réalisation ultérieure d’actions de réduction, voire de suppression de rejets de certaines substances dangereuses. On rappelle en particulier que 6 SDP des listes Fonderie doivent être supprimées à moyen terme, d’abord le cadmium et ses composés, les chloroalcanes C10-C13, les 5 HAP, le mercure et ses composés, et les nonylphénols en décembre 2021, puis l’anthracène en décembre 2028.

Les résultats de la surveillance initiale sectorielle Fonderie

L’étude de branche Fonderie exploite les résultats complets de surveillance initiale d’un échantillon de 45 sites, constitué par 20 fonderies de métaux ferreux et 25 fonderies de métaux non ferreux. Ce modèle représente par estimation environ 25 % des fonderies soumises à autorisation d’exploiter sous le régime des ICPE. D’un point de vue qualitatif, à l’exception du tétrachloroéthylène dans les rejets des fonderies de ferreux, toutes les substances recherchées sont quantifiées au moins une fois. Le bilan sectoriel des niveaux d’émissions représenté dans les figures suivantes montre que les métaux zinc, cuivre, chrome et nickel sont par ordre décroissant les autres substances pertinentes et la substance prioritaire les plus fréquemment quantifiées, en prenant comme critère de fréquence au moins 3 quantifications par plus de 10% des fonderies. Le flux moyen de zinc mesuré dans les échantillons de fonderies de métaux ferreux et non ferreux représente au moins 99% du flux total de l’échantillon analysé. Les substances dangereuses prioritaires nonylphénols sont par ailleurs les substances organiques les plus quantifiées selon les mêmes critères de fréquence par les 2 sous-secteurs. empreinte-innov-graphisme-2 empreinte-innov-graphisme-3

Impact pour les fonderies de ferreux et métaux

Il apparait que sur l’échantillon, 75% des fonderies de ferreux et 84% des fonderies de métaux non ferreux peuvent potentiellement abandonner la surveillance des substances dans leurs rejets (ce qui ne les dispense pas de l’obligation de suppression à moyen terme des SDP qui auraient été quantifiées). Les niveaux de rejets des substances quantifiés par les fonderies, exprimés en concentration moyenne et en flux journalier moyen, sont disponibles dans le rapport de l’étude de branche. Il faut souligner que les rejets de substances dangereuses peuvent avoir pour origine des activités de fonderie, mais aussi des activités connexes comme le travail des métaux, le traitement de surface ou l’émaillage, et des activités annexes de restauration ou de nettoyage. Les substances sont plutôt émises dans les eaux de refroidissement et les eaux pluviales en fonderies de métaux ferreux, et dans les eaux industrielles en fonderies de non ferreux.

Des enseignements complémentaires via les investigations terrain

Les investigations terrain menées dans 4 fonderies volontaires ont permis d’améliorer les connaissances relatives aux émissions des substances dangereuses prioritaires nonylphénols, tout en révélant la complexité de leur problématique. Les incertitudes de leurs mesures et les difficultés analytiques rencontrées pour leur identification dans des produits chimiques limitent en effet l’interprétation des résultats. En fonderie de non ferreux, des liens ont été établis entre l’émission des substances et des activités de nettoyage (sols d’ateliers, sols/surfaces d’un restaurant d’entreprise), et de vibro-abrasion, avec pour origine des détergents, des peintures, et des additifs de vibro-abrasion. Des liens ont par ailleurs été identifiés entre nonylphénols et, des activités de moulage sous-pression et, de moulage coquille utilisant des poteyages à la fois en fonderie de ferreux et non ferreux, sans que l’origine des substances ne soit précisée. Une méthodologie de diagnostic de site est recommandée pour étayer des actions de recherche de l’origine de substances.

Les apports de l’étude de branche Fonderie

22 fiches substances, dont 17 partiellement partagées avec l’étude de branche Travail mécanique des métaux et Traitement de surface CETIM, ont été documentées. Un guide d’application en présente l’utilisation. Les fiches substances :

  • synthétisent les résultats des campagnes de surveillance initiale et d’investigation de sites, en précisant les fréquences de quantification et les niveaux de rejets en concentrations (µg/l) et flux moyens journaliers (g/j) des sites les moins et les plus contributeurs,
  • établissent un recensement des principales utilisations en fonderie et d’autres usages pouvant interférer,
  • identifient des pistes de réduction des émissions de substances en termes de substitutions envisageables, de réductions à la source et de traitements, à adapter au cas par cas selon le contexte de chaque établissement.

La réduction à la source reste primordiale dans un objectif de réduction générale des émissions de micropolluants. Aussi quelques bonnes pratiques sectorielles sont rappelées ci-dessous : —————————————————————————————————–

L’application des Meilleures Techniques Disponibles (décrites dans le BREF Fonderie de 2005):

  • générales (gestion des flux de matériaux, finition des pièces coulées, gestion des eaux résiduaires, réduction des émissions diffuses, et gestion environnementale),
  • et propres à certains process, peut permettre de limiter les rejets de substances dans l’eau.

Des bonnes pratiques techniques et organisationnelles de fabrication, particulièrement :

  • de fusion et moulage permanent,
  • recyclage des eaux de refroidissement,
  • maintenance des équipements, notamment de dépoussiérage,
  • gestion des usages de l’eau et des produits utilisés,
  • entretien des réseaux et des ouvrages de prétraitement et de traitement,
  • gestion des parcs déchets,
  • traitement comme déchets liquides de rejets aqueux chargés mais limités en volume

… sont autant d’éléments de prévention et de réduction des rejets de substances dangereuses.

Perspectives

Les données de l’étude de branche Fonderie sont mises à la disposition des fonderies toujours concernées par l’action nationale RSDE2. Elles pourront leur être utiles lors de négociations avec la DREAL. Les résultats de l’étude peuvent également étayer des discussions entre parties prenantes dans le contexte attendu d’évolutions réglementaires, et en particulier de l’arrêté du 2 février 1998. La réduction du nombre de substances à suivre peut notamment être argumentée. A moyen terme, au-delà de l’action nationale RSDE2, le bilan sectoriel pourra servir de référence aux nouvelles fonderies qui se verront prescrire des exigences réglementaires relatives aux rejets de substances dangereuses. L’étude de branche sera également une contribution à verser aux travaux de révision du BREF Fonderie. Le caractère incitatif des aides des agences de l’eau, pour ce qui concerne les actions de réduction des substances dangereuses, est renforcé par le plan micropolluant. Des études et travaux de réduction de rejets de substances dangereuses pour les sites en rejet direct ou raccordés à un réseau public d’assainissement sont ainsi éligibles aux aides aux entreprises, selon des modalités propres à chaque agence de l’eau. Pour aller plus loin Les livrables de l’étude de branche Fonderie sont téléchargeables librement sur le site www.ctif.com dans l’espace abonnés réservé aux fondeurs, rubrique Environnement & Energie. www.lesagencesdeleau.fr

Les acteurs du comité de pilotage

Contact : Bernard Duquet  

 

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