Le ferroviaire, un marché de niche très porteur
Le salon international de l’industrie ferroviaire a rassemblé plus de 400 exposants à Lille. Parmi eux, des industriels picards qui capitalisent sur un savoir-faire reconnu.
En vingt ans, le salon international de l’industrie ferroviaire qui s’est tenu à Lille du 26 au 28 mars, est devenu un incontournable pour toute la filière. Donneurs d’ordre, équipementiers, fournisseurs, sous-traitants, opérateurs du transport public, constructeurs ferroviaires… Ils étaient plus de 400 à exposer leur savoir-faire au Grand-Palais de Lille dont pas mal de régionaux rassemblés sous la bannière des Hauts-de-France. Parmi ceux-là, des industriels picards qui surfent actuellement sur les efforts engagés en faveur du renouvellement du réseau classique, celui qui a tant souffert pendant trois décennies de tout TGV. En effet, si la Picardie, à la différence du Nord-Pas-de-Calais ne possède pas sur son territoire de constructeur ferroviaire (Alstom et Bombardier sont tous les deux à Valenciennes), elle possède un tissu de PME qui travaillent à des degrés divers pour le secteur ferroviaire. Fonderies, équipementiers (Faiveley à Amiens), métallurgie, électronique, industrie du plastique ou du caoutchouc, entreprises du BTP…
Environ 3500 salariés dépendent du secteur ferroviaire dans les trois départements picards (14 000 au total dans les Hauts-de-France qui revendiquent fièrement le titre de 1ère région ferroviaire française). Des entreprises qui ne sont pas toutes concernées par le tournant numérique mais qui ont su capitaliser au fil des ans sur un savoir-faire reconnu, y compris dans des « veilles industries ». De quoi envisager l’avenir avec une certaine sérénité. « Nous avons connu une période compliquée au cours de laquelle nous n’avions pas beaucoup de visibilité, indique Frédéric Singer, de la direction des partenariats économiques à la Région Haut-de-France. Les grands contrats passés avec les deux industriels dans la région pour le renouvellement des TER et le marché du nouveau RER (NDLR : il a signé par l’Île de France pour un montant de 3,2 milliards d’euros), nous placeraient plutôt aujourd’hui, dans une situation de sous-capacité. Il faudra donc travailler sur la productivité. Pour autant, il n’est pas question de se reposer sur ces lauriers. Il faut d’ores et déjà envisager la suite ».
Celle-là passe, dixit la Région, par un accompagnement des PME censé leur permettre d’élever à la fois le niveau de compétence, mais aussi et surtout celui de leur compétitivité. « L’idée, c’est de tirer les PME vers le haut. Et pour y parvenir, il s’agit de faire en sorte que tout le monde travaille ensemble, pour que les industriels n’aient pas à aller chercher au Maroc, en Tchéquie ou en Chine des savoir-faire que nous avons ici. Ne l’oublions pas : le socle de la filière, c’est bien de tissu de 200 PME sur lequel peuvent s’appuyer les grands acteurs de la construction ferroviaire dans la région ».
Alstom, Bombardier et les grands équipementiers régionaux joueront-ils le jeu ? Oui, si l’on en croit le constructeur franco-canadien de Crespin près de Valenciennes : « Pour Bombardier, le tissu industriel régional est essentiel, explique Anne Froger. Ce n’est pas un hasard si les trains qui sortent de notre usine nordiste bénéficient de la certification Origine France Garantie. Il faut que plus de 50 % du coût de revient d’une rame provienne de L’Hexagone. Nous sommes à 70-75 %, majoritairement dans les Hauts-de-France ». (…)
Chez Davergne, fonderie de cupro-aluminium installée à Feuquières-en-Vimeu, le secteur du ferroviaire n’était pas une priorité, avant le chantier du TGV-Nord. La construction de la ligne et plus particulièrement celle de la caténaire a changé la donne. « La SNCF avait besoin de doubler ses approvisionnements. Nous avons répondu à un appel d’offres », se souvient Dominique Davergne, le Pdg de la société. Aujourd’hui son entreprise est quasiment leader sur le marché des équipements caténaires. Étriers, pendules, pinces… Pour les seuls équipements caténaires, le catalogue Davergne propose 150 références.
L’entreprise sort une nouveauté par mois. Du cuivre pour conduire le courant, de l’aluminium pour donner de la résistance, le tout sévèrement contrôlé en labo, culture de la sécurité version SNCF oblige… L’entreprise a travaillé récemment à l’équipement de la ligne à grande vitesse marocaine. Mais elle livre aussi l’Espagne, le Portugal, l’Allemagne. Plus près de chez elle, comme pas mal de sociétés industrielles liées au ferroviaire, elle bénéficie elle aussi des efforts en faveur de la régénération des lignes existantes. Son outil, régulièrement modernisé, lui permet d’adapter très vite la production à la demande : « Il nous arrive de livrer en urgence 20 carrés (NDLR : cette clé passe-partout carrée dont disposent tous les contrôleurs et mécaniciens) et dans la foulée 500 pièces pour de la caténaire. Notre savoir-faire, c’est aussi là qu’il réside… »
Source : Courrier picard, 31/03/2019